Spécialisée dans la fabrication de ponts métalliques innovants qu’elle installe dans le monde entier, l’entreprise Matière met le cap sur une nouvelle activité en se diversifiant dans le domaine de l’éolien offshore. Le site de Bagnac-sur-Célé est au cœur de cette nouvelle aventure.
Depuis plusieurs années, la société Matière travaille sur un projet de recherche et de développement et a mis au point avec succès un flotteur métallique. Un pari gagnant puisque l’entreprise a été retenue dans un appel d’offres pour la participation à la construction d’une ferme pilote de trois éoliennes offshore, porté par la société Qair et soutenu par l’Ademe et la région Occitanie. Matière aura en charge la fabrication de trois flotteurs de plus de 2 600 tonnes. Elle a choisi son usine lotoise, implantée à Bagnac-sur-Célé, pour réaliser ces pièces hors normes qui seront transportées en sous-ensembles soudés et assemblés définitivement sur le site de Port-la-Nouvelle avant leur mise à l’eau. Un plan de recrutement est lancé. Explications avec Grégory Passeneau, directeur de l’usine bagnacoise.
Depuis quelques jours, un énorme pont roulant sur rails pouvant porter 40 tonnes a été installé…
Il va y avoir en tout trois ponts roulants ; celui-ci de 40 tonnes ; un autre de 150 tonnes sur rails en cours de montage et un troisième sur roues de 40 tonnes aussi. Pour l’étalonnage du plus gros (187,5 tonnes) il va falloir faire venir huit camions de charges.
Il semble, et la rumeur est tenace, que vous ayez pris un énorme chantier ?
Il s’agit effectivement d’un chantier hors normes, pour nous d’un investissement en machines de 3 millions d’euros. Nous devons livrer, à Port-la-Nouvelle, trois flotteurs pour support d’éolienne en mer de 3 000 tonnes chacun ; ce seront au total 92 pièces à assembler, par flotteur, à Bagnac avant de reconstituer le puzzle complet au bord de la mer. Ensuite chaque flotteur – un parallélépipède de 44 mètres de côté et d’une hauteur de 18 mètres – sera tracté en mer, à 18 km des côtes pour être invisible des plages. La base de la tenue de l’éolienne sera aussi de fabrication bagnacoise. L’interrogation actuelle porte sur le prix de l’acier qui est passé en quelques mois de 800 à près de 2 000 € la tonne (même si le chantier n’est pas remis en cause).
Ce projet va-t-il mobiliser toute votre entreprise ?
Pas tout à fait, mais presque (nous avons à préparer une passerelle à Empalot à Toulouse). Il faut dire que c’est le résultat de près de deux ans d’études effectuées par Matière et que ce chantier va mobiliser une grosse partie des effectifs bagnacois pendant quinze mois à partir d’octobre, d’ailleurs, par l’intermédiaire de votre journal je voudrais signaler qu’il nous manque un grand nombre d’assembleurs-soudeurs formés ou à former pour cette réalisation et que nous serions heureux de répondre à toutes les demandes.
Est-ce l’abandon d’Unibridge à Bagnac ?
Non, la production sera dirigée vers d’autres unités du groupe pendant la réalisation du chantier et si vous voyez beaucoup de structures entreposées sur nos chantiers, c’est que les Philippines, qui sortent d’élections, avaient bloqué les expéditions qui vont reprendre ces jours-ci.
Que vont représenter ces éoliennes en matière énergétique ?
La production équivaudra à la consommation d’environ 50 000 habitants par unité, soit 10 mégawatts. Sûrement un bel avenir pour ce genre de constructions entièrement françaises.
Audrey Lecomte avec notre correspondant Jean Moulène – La Dépêche – Le 17/06/2022